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Qu'apporte le design thinking à la méthode Phosphoriales



Brève histoire du design thinking

Le terme  de design thinking est récent, il a été inventé par deux pionniers : Tim Brown et David Kelley,  fondateurs de l’entreprise IDEO, une des premières agences  de design née en 1991 aux États-unis. Voici comment cette nouvelle discipline est née:

“Nous avons commencé à définir ce nouveau domaine de compétences par le terme de « design avec un petit d », afin de le distinguer de l’objet sculptural présenté […] dans les musées d’art moderne. Mais cette formule ne nous satisfaisait pas. Un jour, lors d’une conversation, mon ami David Kelley, professeur à Stanford et fondateur d’IDEO, attira mon attention sur un détail qui l’avait frappé : chaque fois qu’on l’interrogeait sur le design, la forme verbale thinking (« penser ») lui venait immanquablement à l’esprit pour expliquer ce que font les designers. Le néologisme design thinking était né. Je l’utilise désormais pour décrire un ensemble de principes applicables par un large éventail d’acteurs dans la résolution de problématiques variées.” Tim Brown, fondateur d’IDEO

Aujourd'hui on définit officiellement le design thinking  comme l'ensemble des méthodes et outils qui peuvent être utilisées pour innover en appliquant la même démarche que celle d' un designer. C’est une approche de l’innovation et de son management qui se veut une synthèse entre la pensée analytique classique et la pensée intuitive artistique. S'appuyant une  dynamique collaborative de créativité,  elle implique de nombreux allers et  retours avec l’utilisateur final. Ces méthodes ont été élaborées dans les années 80 par Rolf Faste sur la base des travaux de Robert McKim.

 Deux économistes B. Joseph Pine et James Gilmore dans un article paru dans HBR en 1998  Welcome to The expérience economy  ont clairement mis en évidence qu'à travers le développement du design thinking,  c'est la conception de la valeur qui a évoluée.  Celle - ci devant de plus en plus prendre en compte les besoins des clients et en particulier de l'expérience qu'ils espèrent vivre en achetant le produit et ou le service: "La valeur économique a commencé avec les ressources (céréales, minéraux). Les individus ont transformé les ressources en biens, réduisant les ressources à des marchandises. Puis, les services sont nés, réduisant les biens à des marchandises à leur tour. Aujourd’hui, vous l’aurez compris, ce sont les services qui deviennent des marchandises. Les expériences représentent le nouveau type de valeur économique, avec les services comme scène et les biens comme piliers".

Le point de départ c'est l'expérience client

Jusqu'à présent, on pensait que c'était le produit ou le service en lui même qui était le plus important pour le client. Le design thinking postule que c'est d'abord l'expérience qui importe.  Cette « économie de l’expérience » suggère d'explorer beaucoup plus en profondeur cette dimension dans la conception d'un produit et ou d'un service. C'est précisément cette identification qui constitue pour lui le point de départ d'une innovation. Les méthodes d'analyse traditionnelles semblent peu adaptées à la compréhension de ce besoin qui souvent est inconnu pour le consommateur lui même comme l'explique Steve job : “Ce n’est pas le travail des consommateurs de savoir de quoi ils ont envie. Le client est incapable de savoir qu’il veut quelque chose qui n’existe pas encore.” C'est pourquoi les méthodes du design thinking vont considérer que la première étape d'une démarche d'innovation sera l'empathie, qu'on peut définir comme la capacité à se mettre à la place d'un autre pour comprendre sa subjectivité. 

 Rolf Faste a décomposé le processus de Design Thinking en 7 étapes, qui ont été réduites à 5 par Jeremy Gutshe   puis par 3 par Tim Brown, lui même. Le tableau ci - dessous présente les spécificités de chacun des modèles. En passant de 7 à 3, on retrouve un principe fondateur du désign thinking: Le plus simple doit être le plus efficace. "Less is more" comme l'a proclamé le célèbre designer français Philippe Stark
 
Typologie des modèles de processus en design thinking
 
Rolf Faste  Jeremy Gutshe Tim Brown 
1. Définition  1. Empathie  1. Inspiration 
2. Recherche 2. Définition  2. Idéation 
3. Brainstorming 3. Idéation  3. Implémentation 
4. Prototypage  4. Prototypage   
5. Sélection  5. Test  
6. Implémentation     
8. Apprentissage     

Selon le journal Forbes,  c'est aujourd'hui le processus de Jeremy Gutshe qui est le plus souvent utilisé en entreprise. Nous reprenons ici la drescription particulièrement bien réalisée de Mélissa Aldana et Vincent Dromer du site Clap.io 

 

Empathie :
La première phase du design thinking a pour but de se mettre à la place du consommateur et d’essayer de comprendre ses besoins. Il faut donc les rencontrer, les interroger pour connaître leur mode de vie (do), leur pensées (think), leurs sentiments (feel) et leur avis (say). L’objectif : se mettre à leur place pour comprendre ce dont ils ont besoin.

 

Définition: 
Cette étape a pour but de cadrer le problème. Par exemple, si vos clients ne parviennent plus à toucher leur cœur de cible, votre objectif va être de réfléchir à l’origine du problème. Pourquoi connaissent-ils cette problématique ? Depuis quand existe-t-elle ? Quelles sont les dates clés ? Mais surtout, vous commencerez à aborder une question primordiale : comment inverser la tendance ?
 
Idéation:
Cette phase a pour objectif premier de générer toutes les idées possibles pour aider à résoudre les problèmes rencontrés. Réunissez-vous dans une salle assez grande pour regrouper toutes les personnes impliquées dans le projet. Désignez ensuite une personne en charge d’animer le brainstorming. Pour finir, laissez chacun exprimer ses idées, ses projets. Vous pouvez même organiser un ou plusieurs ateliers de divergences pour que les différentes idées se confrontent afin de pousser tout le monde vers le haut et d’aboutir au meilleur projet possible ?

 

Prototypage:
Quelles sont les différentes options existantes pour réaliser ce nouveau projet ? Comment ce projet va-t-il être construit ? L’idée de cette phase de prototypage est de le modéliser, d’en faire une maquette afin de le matérialiser. Un moyen de construire ensemble tout en prenant du recul sur le projet. Ce qui peut très souvent permettre de voir si certaines idées énoncées précédemment sont réalisables ou pas, et si des modifications doivent être apportées.

 

Test:
La dernière phase a pour objectif de tester le projet, d’affiner les solutions proposées grâce au retour des utilisateurs. Le test est le meilleur moyen de savoir si son projet tient la route, si ses idées sont réalisables. Le feedback des utilisateurs vous permettra d’avoir une nouvelle vision de votre projet et de réagir en conséquence. Le but de cette étape est simple : tester vos prototypes, écouter les retours des utilisateurs, modifier, redéfinir et revoir les priorités. Par exemple, si vous vous rendez compte que la nouvelle application mobile que vous allez mettre en service ne peut pas être rentable dans ces conditions, le feedback des utilisateurs vous permettra de changer votre fusil d’épaule, de réfléchir à d’autres possibilités ou de revenir sur une idée déjà abordée mais laissée de côté jusqu’ici.

La convergence du design thinking avec la méthode Phosphoriales

Rappelons que notre objectif dans ce travail n'est pas de faire une comparaison en termes de bien ou de mal. Notre perspective s'inscrit dans une démarche de "hacking"   permanent , c'est à dire de déconstruction et de mise à l'épreuve de notre proposition avec des référentiels qui ont pu nous inspirer ou de nouveaux que  nous découvrons en cours de route. C'est la mise à l'épreuve permanente qui pourra permettre à la méthode Phosphoriales de devenir encore plus robuste et donc plus utile à ceux qui envisagerait de la pratiquer. 
 
 
Comparaison Design Thinking / méthode Phosphoriales
Design thinking  Phosphoriales
1. Empathie  1. Brise Glace
2. Définition  2. Inspiration
3. Idéation  3. Empathie
4. Prototypage 4. Idéation 
5. Test 5. Prototypage
  6. Test
  7. Structuration
  8. Risques 
  9. Communication
  10. Animation 
 
Le modèle "Phosphoriales" reprend les 5 étapes de celui de Jeremy Gutshe. Notons que celui - ci a fait de la "définition" une étape à part entière. C'est entièrement justifié. Nous la retrouvons avec carte des 5 Pourquoi de l'étape 2 que nous avons nommée "Inspiration" et dans la carte 4 de l'étape suivante intitulée "Empathie". En animation, nous insistons beaucoup sur ce point car un projet ou une problématique mal posés au départ peuvent compromettre la suite de la démarche. 

La différence entre nous et Tim Brown c'est que nous avons simplement davantage développé la partie qu'il appelle "Implémentation" en intégrant non seulement certains outils simples de la gestion de projet mais aussi les analyses de JC Fauvet créateur de la socio - dynamie qui prend en compte les stratégies des acteurs face à tout projet de changement et ou d'innovation. Nous avons également rajouté l'étape "Communication" qui correspond à ce que d'autres appelle "Pitch" qui renvoie à la capacité à être convaincant devant un public de financeurs éventuels. La partie " Animation" correspond aux fondamentaux du management d'un réseau d'acteurs. 

Par ailleurs, nous insistons aussi beaucoup sur la dynamique de groupe à mettre en place dès le début d'un processus d'innovation avec un module "Brise Glace" assez développé pour créer un lien social de qualité entre les membres d'une équipe.

Dans les deux approches la démarche est présentée de façon séquentielle mais en réalité, les étapes peuvent se pratiquer dans un ordre différent et les itérations entre les étapes sont nombreuses. Il existe une certaine souplesse entre les différentes parties de la méthode. Mais dans des limites cependant relative qui sont en lien avec les deux temps principaux d'un processus d'innovation à savoir le temps de la conception et celui de l'exécution. 

En réalité peut - être, ce qui sépare les deux méthodes ce sont  les repères théoriques qui sous tendent les 2 modèles. Phosphoriales s'appuie de façon certainement plus prononcée sur les ressources cognitives et sociales qui sont mobilisées au cours des différentes étapes. Chaque étape correspond à des dynamiques que les neurosciences commencent  à identifier. A travers l'apprentissage de la méthode, les participants vont non seulement apprendre à mettre en oeuvre des outils inspirés mais aussi comprendre les activités cognitives et sociales qui y sont associées. Ce qui devrait faciliter leur capacité à choisir les bonnes techniques en fonction des problématiques qu'ils explorent. 

Pour conclure provisoirement sur ce premier "hacking", si le modèle "Phosphoriales" reprend largement les grandes étapes du design thinking, il s'efforce de l'enrichir par d'autres approches qui s'inscrivent en réalité dans le vaste mouvement de l'agilité.

Enfin un dernier point, si nous répugnons à utiliser un jargon teinté d'anglicismes, c'est parce que de nombreux outils existaient déjà dans les techniques de créativité développées dans les années déjà dans les années 70...


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